" Les pages défilent et ne se ressemblent pas. Bienvenue dans
cette zone autonome temporaire de langue française
dédiée à la contre information, à la
communication antagoniste et aux cultures alternatives dit
celle-là, sur le site Samizdat.
Nous avons pour vocation d'établir une plate forme de presse
française et indépendante sur Internet annonce celle-ci,
sur le site Cybersphère, une revue cybernétique. Une
troisième souhaite la bienvenue sur l'un des premiers journaux
électroniques français intitulé Les Humains associés.
Les pages ne se ressemblent pas, mais elles se rejoignent. Toutes sont
des e-zines (pour electronic-zines). Soit : des magazines
électroniques, des revues au rythme de parution parfois
aléatoire, des publications de mordus regroupés autour
d'un thème ou d'un univers, des bulletins en électrons
confectionnés dans l'énergie et, hmm, la passion.
Des fanzines d'un genre nouveau, à l'heure de l'Internet et de
la communication mondiale. Des publications aux finalités
parfois divergentes. Avec les qui-veulent-en-vivre (à chaque
numéro de Cybersphère, son sponsor : Microsoft, Intel,
Island Rds...) et ceux, comme Natacha Quester-Semeon, rédactrice
en chef du Journal virtuel des Humains associés, qui ne cherchent qu'à échanger, partager leurs connaissances, donner autant que recevoir.
Une presse alternative, en quelque sorte. Et qui, par la grâce du
Web, ferait presque jeu égal avec l'autre, établie. Qu'on
y songe : installé devant son ordinateur, le lecteur peut passer
d'un site à l'autre, de CNN à Cybersphère, en moins d'effort que pour aller d'un kiosque à une librairie spécialisée, fournie en presse-bis.
A la démarche coûteuse en temps comme en effort se
substitue le clic, facile et rapide. Un égalitarisme qui va
jusqu'à se nicher dans la présentation même des
publications. A quelques nuances près, les armes graphiques (le
HTML) sont les mêmes pour tous.
Les contenus sont, eux, bien distincts.
Sur Samizdat, le lecteur feuillette les pages d'un
bimestriel d'analyse contre le fascisme (Réflexes), consulte les
archives du Centre de recherche, d'information et de documentation
antiraciste ou plonge dans Tam-tam, un "guide raisonné de
ressources alternatives sur Internet".
Dans la cinquième édition de Cybesphère,
Bruce Sterling, chef de file du mouvement littéraire dit
cyberpunk, livre dans une interview quelques-unes de ses
prophéties (genre : la plupart des changements dus à la
technologie seront douloureux, monstrueux et horribles) tandis que plus
loin, dans la partie de la revue en ligne réservée aux
abonnés (100 F l'an), un dossier piratage informatique retrace
l'histoire du hacking.
De leur côté, depuis l'université de Saint-Denis, des étudiants lancent Babelweb
et brassent, avec bonheur, Internationale situationniste, cyberculture,
pochoirs-graffitis et éthnométhodologie. Figure
même sur leur site la traduction française de Taz (1).
Dernière illustration de cette néo-presse aux allures de bouillonnement : le sommaire du n°7 de la Revue intemporelle des Humains associés, qui décline d'un clic Arnaud Desjardins, Moebius ou Jean Baudrillard en entretiens exclusifs.
C'est donc bien le même esprit mi-frondeur mi-autodidacte, venu
des fanzines de papier, ou à tout le moins des petites revues
indépendantes, qui plane.
Certains webmasters viennent d'ailleurs de ce monde de la bricole, comme Ans, responsable de Samizdat.
Lui et son équipe, "un peu moins nombreuse que le Parti
Communiste chinois à sa fondation mais un peu plus que la bande
à Bonnot", trouvent dans les deux supports des similitudes (sur
l'aspect bricolage des pages, récupération
d'éléments et surtout, possibilités de tout faire
soi-même et avec peu de moyens. Pour ne pas parler du
plaisir...), mais aussi quelques différences : les rythmes, les
modes d'écritures et les galères.
Car des différences entre l'imprimé et l'en ligne, il y
en a. Et beaucoup. Cyril Fievet et Jean-Christophe Thomas de Cybersphère
en entrevoient quelques-unes. Pour eux, l'auteur d'un article
publié sur Internet est plus impliqué que celui d'un
journal "classique", par la seule présence de son adresse e-mail
en bas de l'écran : il s'agit d'une communication de personne
à personne et non plus d'un journal vers une personne. Mais
encore : les coûts (pas de frais d'impression et peu pour la
distribution, ici l'hébergement et les connexions), les
possibilités sur le Web de mises à jour ou d'archivages
des anciens numéros. Sans oublier la lecture hypertexte et sa
logique propre.
Selon les cas, les statuts de ces electronic-zines à la française diffèrent.
Celui des Humains associés est associatif (loi 1901), celui de Samizdat est officiellement une home page, Cyberspère est édité par Quelm, une SARL de presse.
Une diversité que l'on retrouve aussi dans leurs dépenses. Un numéro de Cybesphère coûte 30.000 F. environ (piges, traductions, graphisme, frais administratifs), un numéro du Journal virtuel des Humains associés
ne coûte rien (le web est hébergé gracieusement par
Média Port), un Web exclusivement consacré à Gainsbourg
coûte du temps et des communications téléphoniques
à son créateur, Raphaël Elig, celui de Samizdat
de la sueur et l'hébergement (modique, dans ce cas, via Cybera,
un provider bien disposé envers le milieu associatif).
A en croire chacun des rédacteurs en chef, l'electronic-zine, en
pleine expansion actuellement, en France comme ailleurs, serait l'une
des formes les plus innovantes du Web. A lire leurs productions, on
aurait tendance à appuyer leurs dires. Il y a là,
clairement, une écriture et une diffusion nouvelles,
balbutiantes et fortes. Quelque chose qui rappelle l'âge d'or et
l'inventivité des bulletins contestataires du début des
années 70. Même si ici, tous ne revendiquent pas
forcément la carte subversive.
Mais grande différence entre l'alors et l'aujourd'hui: la
distribution en elle-même. Alors que des centaines de petites
publications papier se sont épuisées sous les tracas du
dépôt-vente en milieu spécialisé (libraires,
disquaires, etc.), les e-zines aujourd'hui n'ont soucis
véritable que celui de l'hébergement. Trois fois rien. "
David Dufresne
(1): TAZ, pour Zone autonome temporaire, un pamphlet
pro-réalité virtuelle signé Hakim Bey,
considéré comme un des textes primordiaux de la
cyberculture.
Quelques adresses d'e-zines, parmi bien d'autres:
BABELWEB: http://www.univ-paris8.fr/~babeiweb/
CYBERSPHERE: http://www.quelm.fr/Cybersphere.html
GAINSBOURG: http://www.platina.fr/~relig/Gainsbourg.html
HUMAINS ASSOCIES: http://www.ina.fr/CP/HumainsAssocies/HA.HomePage.html
SAMIZDAT: http://www.anet.fr/~aris/
" 1978, année punk... en certaines provinces.
Les Play Boys de Nice doivent se souvenir de mon fanzine, Je les bassinais assez les Dentist,
comme ils s'appelaient. Avec ce look impeccable : boots rose fluo, costard droit, croix gammée à
l'oreille ; des concerts, rien moins qu'épiques qui s'achevaient, toujours, sur une sacrée party.
The
man in black, Youri Lenquette, diffusait leur démo et celle d'Abject, via l'une des premières radios
libres.italiennes.
Mais tout s'enflamma vraiment avec Euthanasie Juliette, "On est pas des Sauvages" sous le bras.
Ces débuts !
-Concert de soutien au zine avec la crème des Bordelais d'alors, Standards frenchy-garage en tête.
-Interview d'Eric Débris dans sa chambrette londonienne, à l'heure groovy de Sex Sex Sex.
-Numéro spécial pour les "Boulevards du rock" (festival
local n'ayant jamais connu d'équivalent)... et ventes
consternantes.
Depuis, je n'ai guère relu tout cela. Mais le souvenir des chroniques bien écrites du manager de Wild
Child, de "Paris brûle-t-il?", de Bad Elite, les courriers vengeurs de Marsu, la rencontre d' E.J. avec
Manoeuvre, ou les jetés en règle et sans compter, valaient des points.
Pour ou contre.
Car que de passionnants débats contradictoires avec Bloody Bass, red et raide, avec le sensible
Achème.
Que de motivations réunies !
Ambivalentes ambitions avec Domi/Euthanasie bien sûr, qui me trouvait par trop "délicat".
D'où ma
chanson/hommage alterno (qui cite les frères-grands Tandy) :
EUTHANASIE JULIETTE CHERCHE SUICIDE ROMÉO DE PAU À
MONTPELLIER, ET JUSQU' À BORDEAUX GOLDO ET CASTELVIN, CASTELVIN
DE BON MATIN "On Est pas des sauvages" MAIS "On a Faim !" EUTHANASIE
JULIETTE CHERCHE SIDA ROMÉO BLOODY À LA BASSE ET LES
AUTRES... EN IMPRO !
L'ON S'ABOMINE COMME ON SE COMPLÈTE ELLE AIME LES PROLOS, MOI
LES CHATEAUX ET L'ON S'ACHETE COMME ON SE DÉTESTE ON LUI PAIE
LES CONSOS, ELLE A DE BONS MOTS
EUTHANASIE SE SUICIDE SUR RONÉO
ELLE SORTAIT DE LA LIGUE DES DERNIERS COCOS
ET POUVAIT PRODUIRE LA LIGNE D'UN NOUVEAU ROCOCO
AUX PLUS DÉSOEUVRÉS ELLE S'IDENTIFIE MAIS À FORCE
DE MALTRAITER LA SOCIOLOGIE ELLE EN OUBLIE TOUS NOS VRAIS ENNEMIS ET EN
OMET AUSSI NOS PLUS INSOUMIS
EUTHANASIE N'A NI VOILETTE NI MISE EN PLIS
CAR ELLE APPARTIENT AUX ANNÉES 80
AUX DERNIERS DES PUNKS ET À "La peau de ça craint"
EUTHANASIE PAPI ! EUTHANASIE TATI !
ET POUR VOUS AUSSI, JULIETTE, EUTHANASIE !
JE RESTE TON NÉGATIF EN GUISE D'APÉRITIF ET TE
DÉCLARE LA GUERRE EN GUISE DE DESSERT SI L'OUTRAGE SAUVAGE
C'ÉTAIT L'BON TEMPS LE BEL ET GRAND OUVRAGE C'EST MAINTENANT !
LA PETITE KEUPONNE AURA "La Vie au grand Hertz" LA FILLE D'INSTIT SAURA
POURQUOI JE L'ÉVITE COMME UN CORBILLARD DÉVIE UNE
LOCOMOTIVE COMME UN TORTILLARD SE FOUT DES LEITMOTIVE
EUTHANASIE JULIETTE CHERCHE SUICIDE ROMEO DE PAU À MONTPELLIER
ET JUSQU' À BORDEAUX SIDA ROMÉO ZÉLÉ TE
SALUE, CHÈRE TATI JUJU ! EUTHANASIE JULIETTE, KEUPONNE DE
FLEURETTE !
Son style mi-vécu et tant-pis-pour-les-mythes,
mi-affectivement exagéré, ne manquait vraiment pas de piquant.
Un seul regret. Cette lettre recto-verso qu'elle m'expédia, délicatement empreinte de traces de gras,
chargée de rognures d'ongles encadrées et légendées, ainsi que de crottes de nez savamment
collées...
J'aurais dû l'encadrer !
Mais dites. Dans les rédac' dignes aujourd'hui encore du nom de fanzines, c'est toujours comme ça ? "
Patrick SCARZELLO
par Patrice Richard (NEW WAVE, SUB ROCK et... CELIA)
" La presse fanzine ne date pas de 1977, sûr, puisqu'en France,
elle prit un réel essor suite à Mai-Juin 1968, à
la fois sous un aspect politique (l'Enragé, le Pavé, le
Petit Livre Jaune - car imprimé sur feuilles jaunes -, etc.) et
culturel, dans la foulée du freak / hippie movement californien
(le Parapluie, le Citron Hallucinogène, etc.).
La presse freak tint moins longtemps que la presse politique, encore
bien vivante aujourd'hui, notamment sous la forme des zines de
quartier, tandis que la musique, confinée à la presse
freak dans les années 68 / 70, créait ses propres
fanzines avec l'explosion punk.
La presse fanzine musicale est toujours née de la nullité des grands médias rock. Déjà, en
1973/1974, se créait "la Nébuleuse Germanique", fanzine consacré à la vague allemande des
Kraftwerk, Tangerine Dream et autres Popol Vuh, négligés par nos Best, Extra et autres Rock &
Folk. Onze numéros parus, jusqu'à ce que ces grands groupes créatifs aient la place qu'ils
méritaient.
Le même cirque recommença en 1976 / 1977avec le punk, passé sous silence ou décrié dans la
presse officielle "baba", bluesy ou pop.
Ce furent Gare du Nord, Annie aime les Sucettes, puis New Wave en 1980, Moderne, et plein
d'autres, des milliers !
Evidemment, rédiger un fanzine est une histoire riche... d'histoires ! tellement riche qu'il faudrait en
faire un livre !
Alors, pour vous faire saliver en attendant ce livre qui mijote, voici quelques anecdotes marrantes.
"Poubelle de Luxe" a été créé en 1979 par les futurs fondateurs de "New Wave" et "Moderne"
et s'était fixé pour but de ridiculiser les fanzines
"branchés snobs mondains"qui pullulaient en 1979 / 1980 avec
l'éclosion de la "New Wave", cette opération commerciale
des multinationales du disque pour écraser le message rebelle du
punk. Dans "Poubelle de Luxe", on chroniquait des
films qu'on n'avait jamais vu et on y faisait l'apologie du premier jeu
électronique apparu dans les cafés français, le
fameux Space Invaders.
"Sub Rock" tenait à la fois du fanzine et de
la "grande" presse. A son origine, un trust de revues sados / masos
pornographiques qui avait besoin d'un numéro de commission
paritaire pour faire des économies sur leurs factures,
numéro qui est refusé aux magazines X. Alors, ils
décidèrent de lancer un magazine de rock pour couvrir le
tout. L'équipe de "New Wave" fut embauchée et cela donna de Janvier à Juin 1990 "Sub Rock",
30.000 exemplaires en kiosques, certes, mais au contenu 100% "New Wave"
et en noir/blanc, rareté en kiosques! L'aventure tourna court
à cause de la bêtise des financiers. Pardi, lorsqu'un
célèbre photographe rock apporta au big boss des photos
de Mickaël Jackson, celui-ci s'exclama : "ouah, super ! de quoi
illustrer mon article sur... Prince"... no comment !
"New Wave" est né en
1980 d'un autre fanzine. Rappel historique : en 1978, des dizaines de
filles et de garçons de moins de 18 ans créent le
"collectif des mineur(e)s en lutte" et posent la question des "droits
des enfants" en fuguant collectivement de leurs familles ou de leurs
foyers DDASS pour occuper la Faculté de Vincennes quinze jours
en 1979. En est né le fanzine "le Péril Jeune",
défunt en 1980. Mais son comité de rédaction,
résolument punk et rebelle, s'unit à des pros du fanzine
et lança en 1980 "New Wave".
Aujourd'hui, la presse manga est le nouveau fleuron de la presse
fanzine. On y trouve des articles musicaux touchant surtout au gothik
au hard rock ou à la tekno, bandes-sons des oav (vidéos
mangas). Celia, né en 1996, créé par le staff "New Wave", a une rubrique consacrée uniquement aux groupes de filles. Au japon, il y a plus de 1500 groupes de filles rock !
Quand vous faites un zine, l'interview, c'est le passage obligé ! Alors, à "New Wave", oui, on a rencontré des stars ! (cris des fans en délire !).
Sachez que Jimmy Pursey est super sympa, qu'il rit tout le temps.
Qu'Adam Ant est tout petit, court sur pattes et boudiné (raté, le beau pirate ! Errol Flynn assurait mieux),
que Jo Lemaire est adorable et très sensible (Patrick Eudeline,
un jour à Bruxelles, la harcelait en l'accusant de plagier
Siouxie, dans sa loge. Tout en la taquinant, il buvait tout ce qui
traînait. Et à un moment, il fit la grimace : il venait
d'avaler d'un trait le démaquillant de Jo Lemaire ! Il en a vomi
sur tout le trajet de retour en car Bruxelles-Paris !) ;
Siouxie est une vraie princesse lugubre qui feint de ne pas comprendre
le français lors des interviews ; les groupes français
adorent les questions mais ignorent souvent les réponses ; Lydia
Lunch se livre "corps et âme" parfois aux intervieweurs ;
j'arrête là, on va se croire à "Voici Gala" !
La morale d'une histoire de fanzine ? faites-en !"